Marvel - Thunderbolts ou l'art de recycler

Marvel - Thunderbolts ou l'art de recycler

Marvel est en crise. On le sait, vous le savez, et visiblement, ils ont décidé de continuer sur leur lancé. Avec son dernier bébé, Thunderbolts, le studio pousse même l'ironie jusqu'à afficher son logo, autrefois glorieux, lentement envahi par l’ombre. Belle symbolique, mais ce clin d'œil au déclin évident ne suffit pas à masquer le véritable problème, Marvel tourne en rond. Imaginez Florence Pugh, talent brut, perchée sur la tour Merdeka 118 en Malaisie, deuxième plus haut gratte-ciel au monde. Elle plonge dans le vide, dramatique, introspective, presque digne d'un Nolan, jusqu’à ce que tout soit gâché par une réplique désabusée: « Peut-être que je m’ennuie, finalement ? » Oui, Florence, nous aussi. Marvel ne peut s'empêcher de désamorcer chaque instant sérieux avec des blagues dignes d’un épisode moyen de sitcom.

C’est d’autant plus frustrant que l'actrice porte littéralement le film sur ses épaules. Avec une présence digne de l'âge d'or de Robert Downey Jr. ou Chadwick Boseman, elle réussit presque à faire oublier que le scénario n’a rien à offrir d’autre que du recyclage de personnages secondaires oubliables et de concepts déjà vus ailleurs (coucou, DC et ta Suicide Squad). Car Thunderbolts, c’est exactement ça, un ramassis de seconds couteaux, un rassemblement de héros de troisième zone réunis par Marvel faute de mieux. On retrouve ainsi la "White Widow" de Florence Pugh, "Ghost" (vous savez, la méchante anonyme d’Ant-Man 2), un pseudo Captain America perturbé (Wyatt Russell, en direct de Disney+), et David Harbour en Red Guardian, charmant mais définitivement secondaire. Seul Sebastian Stan, en vétéran désabusé apporte une touche d’amertume bienvenue, mais même lui peine à sauver ce naufrage collectif.

Le pitch ? Julia Louis-Dreyfus, alias Valentina Allegra de Fontaine, sorte de Nick Fury du pauvre, réunit tout ce beau monde dans une mission absurde pour les pousser à s’entretuer afin de couvrir ses propres manigances politiques. Un scénario aussi paresseux qu’absurde, qui vire très vite au festival de blagues faciles et d’autodérision lourdingue. Soyons honnêtes, le film aurait pu être une critique acerbe du modèle Marvel lui-même, une satire cinglante sur la surexploitation des héros et le recyclage sans fin de ses personnages secondaires. Mais non. Marvel préfère s’arrêter en chemin et transformer ce potentiel pamphlet en gentille production, où tout le monde échange des vannes en attendant que quelque chose se passe.

La première heure du film se déroule presque exclusivement dans une prison générique du Sud-Ouest américain, décor minimaliste pour économiser sur les effets spéciaux, probablement après l’échec coûteux du récent Captain America 4. Le réalisateur Jake Schreier livre une mise en scène banale, digne d'un téléfilm de luxe, qui ne fait qu’accentuer l’impression que Marvel ne cherche plus qu’à remplir un cahier des charges. Pourtant, quelques éclairs de génie viennent rappeler ce que le studio emblématique pourrait être avec un peu d’audace. Un moment visuel marquant, par exemple, lorsque Sebastian Stan débarque à moto façon Tom Cruise dans ses jeunes années. Ou encore la scène étonnamment sincère où Harbour et Pugh échangent sur les traumatismes d’enfance, rares instants où le film ose enfin ralentir pour raconter quelque chose d'humain.

Mais ces rares moments ne suffisent pas à masquer le vide général. Même le twist du troisième acte, une métaphore lourdingue sur la dépression et la culpabilité, peine à convaincre, malgré les efforts de Florence Pugh pour y injecter de l’émotion réelle. Elle, au moins, semble croire au film qu'elle défend, contrairement à Marvel qui hésite toujours entre sérieux et dérision facile. Finalement, ce qui marque le plus dans Thunderbolts, ce sont ses scènes post-génériques, autrefois moments forts du MCU. Ici, elles ne font que rappeler tristement que le studio se contente désormais de teaser le prochain épisode pour maintenir l’attention d'un public de plus en plus blasé. Pourtant, force est de reconnaître que pour la première fois depuis longtemps, ces teasers réveillent un semblant de curiosité. Peut-être parce que l’on se demande simplement jusqu'où Marvel pourra encore tirer sur cette corde usée.

En conclusion, Marvel fait du surplace, recycle sans vergogne ses vieux ingrédients et compte sur ses acteurs pour masquer son manque cruel d’idées. Thunderbolts aurait pu être une audacieuse remise en question du modèle MCU. À la place, on obtient un divertissement passable mais frustrant, une sorte de fête où les héros ratés viennent tuer le temps avant qu’on ne les oublie définitivement.

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