Elon Musk - L’argent roi et les promesses brisées

Elon Musk n’a jamais eu de scrupules à brandir son portefeuille pour obtenir ce qu’il veut. Ou, du moins, à faire miroiter des promesses mirobolantes pour arriver à ses fins. Pendant la dernière campagne électorale américaine, le milliardaire a juré de payer les électeurs des États pivots s’ils signaient une pétition en faveur de son PAC pro-Trump (l'America PAC). Mais aujourd’hui, certains de ces signataires affirment que l’argent n’a jamais été versé et traînent l’intéressé en justice pour des millions de dollars. Bienvenue dans le monde d'Elon, où les promesses sont des chèques en bois et l’éthique une option facultative.
L'America PAC, son jouet politique, a promis 47 dollars immédiatement et 100 dollars plus tard aux électeurs inscrits des États pivots s’ils paraphaient une pétition prétendument en soutien aux premier et deuxième amendements. Mieux encore, des bonus de parrainage étaient offerts pour chaque nouvelle signature recrutée. Mais une action collective déposée devant un tribunal fédéral de Pennsylvanie révèle que le patron de Tesla et X n’a pas tenu parole. Les plaignants, dont trois leaders originaires de Pennsylvanie, du Nevada et de Géorgie, affirment qu'il a manqué à son engagement de payer intégralement les signatures et les parrainages. Certains d’entre eux, ayant même travaillé comme démarcheurs pour l'America PAC dans le Michigan et la Géorgie, disent avoir échangé avec de nombreuses autres personnes frustrées par ces paiements manquants. Le groupe estime que plus de 100 plaignants pourraient rejoindre la plainte, avec des dommages dépassant les 5 millions de dollars.

Ce n’est pas la première fois que le milliardaire se retrouve dans le collimateur. Un autre habitant de Pennsylvanie a déjà intenté une action similaire, espérant la transformer en recours collectif. Shannon Liss-Riordan, avocate du cabinet représentant les plaignants, ne mâche pas ses mots:
“Cette affaire concerne une promesse non tenue. Elon Musk a juré de payer ceux qui signeraient sa pétition et en recruteraient d’autres. Nos clients y ont cru, mais malheureusement, cette promesse n’a pas été honorée.” Et elle ajoute, cinglante: “Il semble que celle-ci ait été rompue pour bien d’autres encore.”
Pendant la campagne de 2024, Elon Musk a dépensé sans compter: 277 millions de dollars pour soutenir des candidats républicains, dont Donald Trump, avec 239 millions canalisés via l'America PAC. En octobre, il a poussé l’audace plus loin en annonçant un tirage au sort quotidien d’un million de dollars pour les électeurs inscrits des États pivots, affirmant vouloir atteindre un, voir peut-être deux millions de signataires en faveur des premier et deuxième amendements. Une initiative qui a immédiatement suscité l’ire. Le gouverneur de Pennsylvanie, Josh Shapiro, a dénoncé l’injection d’argent dans la politique comme sérieusement problématique. Le ministère de la justice a averti Musk que son stratagème pourrait être illégal, tandis que d’anciens responsables républicains ont exhorté le procureur général Merrick Garland à enquêter sur ce qui ressemblait à des paiements prohibés pour l’inscription des électeurs.
Public Citizen, une organisation de défense des consommateurs, a porté plainte auprès de la Federal Trade Commission (régulateur du commerce américain), accusant le concours du milliardaire d’être une tentative déguisée de motiver l’inscription et le vote en faveur de Trump dans les États clés. Le procureur de Philadelphie, Larry Krasner, a même tenté de faire interdire ce qu’il qualifiait de loterie illégale. Mais Elon Musk, fidèle à lui-même, a contourné les critiques en redéfinissant son concours comme une rémunération pour devenir porte-parole. Lors d’une audience, son avocat, Chris Gober, a assuré que les gagnants n’étaient pas choisis au hasard, tandis que le directeur de l'America PAC, Chris Young, a expliqué qu’ils étaient triés pour leur personnalité et leur alignement avec les valeurs de l’organisation. Un juge de Pennsylvanie a fini par valider ces tirages au sort juste avant l’élection, ouvrant la voie à un précédent dangereux.

Musk n’en est pas resté là. En mars, il a récidivé dans le Wisconsin lors d’une élection à la Cour suprême de l’État, promettant deux chèques d’un million de dollars lors d’un événement réservé aux électeurs ayant déjà voté. Son propre chatbot, Grok, a qualifié cela de possible corruption électorale. Malgré les tentatives du procureur général du Wisconsin pour stopper cette mascarade, elle a été autorisée à se poursuivre. Et le patron de SpaceX a continué, offrant 100 dollars aux électeurs du Wisconsin pour signer une pétition contre les “juges activistes”. À ce rythme, attendez-vous à ce qu’il sorte à nouveau son carnet de chèques pour la prochaine élection.
Musk ne se contente pas de jouer avec la démocratie américaine. Depuis qu’il a racheté Twitter en 2022, rebaptisé X, il a transformé la plateforme en un terrain vague où tout est permis, y compris pour des groupes terroristes. Selon un rapport du Tech Transparency Group, des comptes affiliés à des organisations comme le Hezbollah, le Hamas, les Houthis et d’autres groupes militants d’Irak et de Syrie prospèrent sur son réseau social. Ces comptes, souvent abonnés aux services premium, bénéficient de la fameuse coche bleue et d’une priorité algorithmique pour diffuser leur propagande. Pire, X semble ignorer les sanctions américaines interdisant les transactions avec des entités sous embargo. Un premier rapport en février 2024 avait déjà tiré la sonnette d’alarme, entraînant la suppression de certains comptes. Mais un mois plus tard, beaucoup étaient de retour, comme si de rien n’était.
Pourquoi X est-il devenu un refuge pour ces groupes ? Peut-être parce qu'Elon Musk n’a jamais fait du contrôle de contenu une priorité. Les dealings financiers avec des organisations terroristes ne sont pas seulement une catastrophe d’image, ils sont potentiellement illégaux. Pendant ce temps, l’administration Trump, que le milliardaire a si généreusement soutenue, bombarde les Houthis au Yémen tout en laissant leurs comptes prospérer sur sa plateforme. Ironique, non ? Ce dernier se présente comme un champion de la liberté d’expression, mais son règne sur X et ses acrobaties électorales révèlent une vérité plus sombre: il manipule, promet, et esquive. Les électeurs floués, les procès qui s’accumulent et les comptes terroristes en libre-service montrent un homme qui joue avec le pouvoir sans jamais assumer les conséquences. Et pendant qu’il parade, les victimes de ses promesses brisées attendent toujours leur dû. Combien de temps encore laissera-t-on un tel personnage réécrire les règles à coup de milliards ?